Ses paupières. Elles étaient lourdes. Lourdement abattues sur ses yeux. Lourdement abattues sur sa vision. Lourdement abattues sur son subconscient. Tout ce qui était visible et palpable était pour le moment invisible et intouchable. Paupières closes sur regard carmin, il n'y avait que du noir. Douloureuses, tremblantes, elle hésita plusieurs fois à les ouvrir. Elle essaya. Elle essaya d'essayer même. Elle se ravisa. Et puis elle recommença, sans plus de succès. Aucune notion de temps, aucune perception des mouvements de la vie dans cet univers de charbon. Elle ne sentait ni son corps, ni son esprit, engourdis dans un néant insondable. Son cerveau grésillait de messages incompréhensibles qui se mêlaient en une toile neurologique indigeste. Son cœur battait, probablement. Sûrement. Sinon, elle serait morte. Morte ? C'était peut-être le cas, après tout. Mais non, elle sentait ses étranges battements irréguliers qui venaient frapper sa poitrine. Alors quoi ? Elle pouvait bien ouvrir les yeux. Un pincement. Elle entrouvre ses lèvres dans un gémissement silencieux, invisible et inaudible et, dans une décharge électrique d'actions chuchotées, elle ouvre grand ses yeux sanglants.
Elle pensait pouvoir distinguer de la lumière qui l'éblouirait et lui déchirerait les yeux d'une douleur clinquante. Elle pensait pouvoir distinguer l'étincelle d'une vie bienfaitrice qui allait l'accueillir de toute sa blancheur, elle qui sortait d'un sombre vide ténébreux. Mais non. Elle avait beau plisser ses yeux pour tenter de distinguer quelque chose. Mais non. Elle avait beau forcer un peu plus, toujours un peu plus. Mais non. Elle quittait un néant pour se retrouver dans un autre. Autour d'elle, juste un vaste océan d'encre. Il semblait tout avaler. Elle tenta d'ouvrir la bouche, de crier quelque chose. Elle le faisait, elle le savait. Pourtant, elle n'entendait rien. Juste le silence. Le silence qui étouffait et dévorait le moindre petit son. Elle essaya de courir. Elle y arrivait, elle avançait. Pourtant, tout restait identique. Comme si elle restait sur place. Ou comme si il n'existait réellement rien autour d'elle.
Où était-elle ? Cet endroit, elle ne le connaissait pas. Elle ne le connaissait absolument pas. Une vaste représentation de l'inconnu le plus parfait. Ce lieu avait-il un nom ? Peut-être que oui, mais dans ce cas, il ne lui était pas connu. Peut-être n'en avait-il pas ? Dans ce cas, elle n'avait même plus besoin de se poser la question, car elle était véritablement au milieu de nul part. Épuisée, comme si cet endroit aspirait également la vitalité de son corps maladif, elle se laissa lentement tomber sur les genoux, son regard affolé parcourant cette noirceur. Un frisson brisa la routine de son corps alors que de multiples pensées s'écoulaient dans son crâne. Mais, d'ailleurs... Qui était-elle ? Son nom ? Qui ? Où ? Comment ? Pourquoi ? Elle ne le savait pas. Elle ne le savait absolument pas. Alors, peut-être qu'elle aussi, en fait, elle ne possédait aucune identité ? Peut-être qu'elle aussi elle n'était qu'une petite tâche blanche inconnue dans cet endroit lui aussi sans nom ?
Tremblante, elle se releva avec mal. La main crispée sur son cœur affolé, elle marcha lentement vers l'horizon. Ou ce qui lui semblait être l'horizon. Une ligne noire sur un monochrome noir. Elle s'enfonçait un peu plus dans ce qu'elle ne connaissait pas. Folie ? Peut-être. Avait-elle seulement le choix d'aller plus loin sur ce chemin d'ombres ? Probablement pas. Alors, autant foncer et se jeter directement dans l'impalpable. Quitte à s'y noyer.
Sa chaussure immaculée buta sur un obstacle, rampant sur le sol. Un escalier. Un escalier tordu qui, inversé et impropre à la logique, s'enfonçait un peu plus dans les abysses. Un pas, puis deux, sur les marches d'ébène. Le noir restait noir, mais c'était comme si elle s'enfonçait dans d'épais nuages... noirs. Étouffante, l'atmosphère changeait elle, plus rapidement que le paysage qui, lui, restait de marbre.
L'escalier à l'envers s'arrêtait ici. Elle ne pouvait pas aller plus loin. Face à elle se trouvait le cadran d'un clocher retourné. En levant les yeux, elle pouvait distinguer la porte qui s'enfonçait verticalement dans ce ciel infini. Progressivement, un son résonnait. Faible. Puis de plus en plus fort. Jusqu'à venir cogner contre les parois de sa tête. Un TAC maladif. Puis un TIC ébréché.
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